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Trouble dans le genre : Judith Butler

Trouble dans le genre : Judith Butler

Faire reconnaître son statut de minorité sexuelle est une tâche difficile dans le cadre légal, politique et linguistique des discours dominants, je continue à penser que cette reconnaissance est vitale.

Judith Butler

Trouble : entre genre et sexe

Pour la Pride Month, on s’immisce dans Judith Butler, et on vous fait un résumé de Trouble dans le genre.

Au départ écrit pour critiquer certains mouvements féministes des années 80-90, il est devenu un monument de la pensée queer et du genre.  Sorti en 1990, il évoque la possibilité d’une vie au-delà de l’hétéronormativité.

De Simone de Beauvoir à Foucault, Trouble dans le genre met en avant la possibilité de concevoir différemment le genre et le sexe. 

En pensant la signification du mot « feminin », Butler remarque que la question du genre et entièrement liée au rapport que nous avons avec la notion de sexe. Entre culture et nature, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. La définition ancienne du « feminin » se trouve alors remise en question, et est déstabilisée, aussi bien que celle de « la femme ». 

« Femme », même au pluriel, est devenu un terme qui fait problème, un terrain de dispute, une source d’angoisse. 

Judith Butler

Trouble dans le genre est donc un livre sur la possibilité d’une nouvelle signification « du féminin » et de « la femme ». Butler va tenter de revenir sur ces mots, en explorant la question de la binarité et du genre. Et en étudiant le genre indépendamment de la question du sexe, Butler va réussir à l’affranchir du corps. 

En effet, le genre est quelque chose de culturel, il ne découle pas automatiquement du sexe. Homme et masculin peuvent alors faire référence à un corps féminin comme à un corps masculin et vice-versa. C’est à partir de ce constat, que Butler va remettre en question la binarité du genre. 

Pour elle, même si la morphologie et la constitution des corps paraissent confirmer l’existence de deux et seulement deux sexes (ce qu’elle questionnera), « rien n’autorise à penser que les genres devraient aussi s’en tenir au nombre de deux ». 

Mais elle ne s’arrête pas là. En effet, elle montre aussi que le corps est un ensemble de significations culturelles. Le corps est un instrument qui nous permet d’agir dans le monde et n’est qu’interprétation. C’est parce que nous souhaitons nous l’approprier, en faire quelque chose pour soi, qu’on l’interprète et qu’on lui donne une signification purement culturelle. 

On attache des significations culturelles et externes à notre corps. De ce fait, le corps est quelque chose qu’on interprète, et sa signification est toujours en construction.

C’est pourquoi, poser la question du genre et la possibilité de sa pluralité, c’est aussi poser les mêmes questions pour le sexe. En effet, pour Butler :

Le sexe est, par définition, du genre de part en part.

Judith Butler

Derrière la théorie

Pour arriver à cette idée, Butler a dû faire un pas dans l’histoire. La tradition philosophique, de l’antiquité aux modernes (Platon à Descartes), jusqu’à Sartre, avait mis en évidence une distinction : celle de l’âme (conscience, esprit) et du corps. Et cette même distinction sous-entendait des rapports hiérarchiques : l’esprit survit au corps et tente toujours d’échapper à lui. 

Pourtant, au fil de temps, la catégorie « femme » a été assimilée au corps, et la catégorie « homme », à l’esprit. Cette association étudiée par Elizabeth Spelman, dans Woman as a body, révèle que l’esprit libre a été associée au masculin, et que le corps, lui, qui empêche cette liberté, a été associé au féminin. 

Les hommes ont donc été glorifiés, et les femmes ont été réduites à leur corps, leur sexe. De ce fait, selon Butler, « le seul genre marqué est le genre féminin ». Bien plus, il est cet autre qui empêche la libération de l’homme. Le sexe féminin est devenu un danger. Il est cet autre du sexe masculin qu’on ne saurait voir. 

Pourtant, la binarité du genre n’a pas réellement de sens. La société a mis en place cette hiérarchie des sexes et cette binarité en fonction de théories qui augmentaient le pouvoir des hommes hétérosexuels, jusqu’à en faire une norme culturelle.

C’est pourquoi Butler se demande, si  « les « femmes » n’ont-elles de lien qu’en vertu de leur oppression ? » En effet, on peut donc se demander si la catégorie « femme » n’est pas  justement et simplement, la catégorie des opprimés, plutôt qu’un fantasme d’une catégorie de genre ou de sexe. 

L’hétérosexualisation du désir a institué l’opposition binaire et hiérarchique entre le « féminin » et le « masculin ». Et par là a réduit les femmes au corps, tout en supprimant la possibilité d’autres formes d’identités sexuelles. 

C’est pourquoi Trouble dans le genre est un livre important. Il formule à l’intérieur de ce cadre hétéronormatif, « une critique des catégories de l’identité que les structures juridiques contemporaines produisent, naturalisent et stabilisent ». 

Selon Butler, pour arriver à supprimer ces rapports, il faut que les analyses féministes cherchent à comprendre comment la catégorie « femme » – le sujet féminisme – est produite et contenue dans les structures du pouvoir, au moyen desquelles l’on s’efforce de s’émanciper. Et elle ira jusqu’à écrire : 

Peut-être la « représentation », la politique féministe, finira-t-elle paradoxalement par n’avoir de sens pour le féminisme qu’au moment où l’on aura renoncé en tout point au postulat de base : le sujet « femme ».

Judith Butler

C’est toute la pensée binaire du sexe et du genre qui est remise en question. Pour Butler, il faut supprimer la notion de sexe pour supprimer cette hiérarchie. En évoquant les positions de Wittig ou de Foucault sur le sujet, elle montre que « la catégorie même de sexe disparaîtrait, voire s’évanouirait, si l’hégémonie hétérosexuelle était perturbée et renversée ». 

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Binge drinking et black-out, ces soirées qui finissent mal

Binge drinking et black-out, ces soirées qui finissent mal

 “ Je bois jusqu’à ne plus me rappeler de rien du tout le lendemain, ni de savoir comment je suis arrivée saine et sauve dans mon lit (…), c’est l’horreur.”

Forum, Alcool info service

Binge drinking, un problème ?

Consommer de l’alcool en grande quantité sur un laps de temps très court a un nom : le binge drinking.

En recherchant l’ivresse, les individus se mettent en danger et se sentent angoissés dans leur consommation. Entre amusement et alcoolisme, certains se posent des questions. 

« Je me sens nulle de me mettre dans des états pareils… Je ne comprends pas pourquoi je ne peux pas boire quelques verres comme tout le monde et rester une personne décente… Rester moi-même en fait. »

Forum, Alcool info service

Binge drinking

En fait, on parle de binge drinking quand un individu boit plus de 4,5 verres en moins de deux heures. Et lorsque cela arrive plus de deux fois en deux semaines, il semble qu’il y ait un problème.

Selon Healthline, si vous « bringe dinkez » à certaines occasions, cela ne signifie pas pour autant que vous ayez une addiction à l’alcool, c’est un comportement, non une maladie.

Mais si vous « binge drinkez » très souvent, vous aurez plus de chance de développer une dépendance ou des troubles liés à la consommation d’alcool. Et cela peut avoir des conséquences sur le long terme.

Plus vous commencez jeune, plus vous avez de risque lorsque vous vieillissez. Selon une étude anglaise, le binge drinking, contribue de manière négative sur l’individu, au niveau de sa santé, mais aussi lorsqu’il rentre dans l’âge adulte.

Il a plus de risque d’être marginalisé et d’avoir un statut social moins élevé. En effet, cela peut avoir un impact sur nos relations sociales, notamment lorsqu’on dérape un peu trop souvent.

« Hier encore j’ai dérapé, lors d’une fête, j’ai bu comme un trou et je me suis transformée en monstre. Moi la fille gentille, fun et bien élevée, me voilà insupportable, vulgaire et agressive. »

Forum, Alcool info service

L’ivresse, de manière générale, a des conséquences immédiates. Cela change la manière dont nous parlons, dont nous percevons, et peut nous amener à être plus agressifs. Mais cela peut aussi nous amener à avoir des comportements à risque, voire à nous mettre réellement en danger.

Boire jusqu’au black-out 

Si la consommation excessive n’expose pas aux mêmes dangers que celle quotidienne du fait de sa ponctualité, elle nous rend très vulnérables.

 « J’ai commencé à tenir de mieux en mieux l’alcool, à boire de plus en plus vite et de plus en plus jusqu’à désormais être en soirée et n’avoir plus qu’un but : boire plus. Malheureusement le lendemain je me réveille avec des trous noirs de plus en plus importants (parfois la soirée entière) où l’on me raconte ce que j’ai pu dire ou faire et c’est extrêmement embarrassant. » 

Forum, Alcool info service

Consommer excessivement de l’alcool a impact sur la mémoire à court terme, celle-ci ne se connecte plus avec notre mémoire à long terme.

Lors d’une grosse soirée, et d’une consommation excessive, des informations ne sont plus stockées dans notre mémoire à long terme. C’est pourquoi, il arrive qu’on ne se souvienne plus de rien.

L’alcool va perturber notre hippocampe, la zone du cerveau liée à la mémoire. Une fois cette zone endommagée, les black-outs seront plus fréquents.

Il existe deux sortes de black-out, le fragmenté et le complet. Dans le premier, la personne ne peut pas se rappeler de tous les détails de la soirée. Dans le deuxième, c’est une perte de mémoire définitive, et les souvenirs ne peuvent pas être récupérés. 

Le black-out, symptôme d’intoxication légère, secoue notre cerveau. Dans un environnement familier, comme la maison, ces troubles de la mémoire passent même souvent inaperçus. Le cerveau a tendance à remplacer les trous noirs avec des souvenirs antérieurs. L’individu pense alors se rappeler en détail de la soirée.

Sur le long terme, cela peut créer des lésions définitives sur le cerveau et donc réellement diminuer les capacités de notre mémoire. Pourtant, un arrêt de la consommation excessive d’alcool peut permettre d’éviter ces lésions et les épisodes de black-out. 

Eviter le black-out

La carence en vitamine B1 joue aussi un rôle important. En effet, nécessaire pour le métabolisme des glucides, elle permet la dégradation de l’alcool et aide le foie. Elle est indispensable pour le bon fonctionnement de notre cerveau. 

Une personne alcoolique a en fait une importante carence en vitamine B1, et sur le long terme, celle-ci peut provoquer la démence. C’est pourquoi, pour limiter l’impact de l’alcool sur les circuits neuronaux, un apport en B1 est conseillé. 

On trouve généralement cette vitamine dans la levure alimentaire, les céréales, la viande, et les oléagineux (les amandes, les noix..). Pour éviter donc ces épisodes de black-out, il faut éviter la carence en vitamine B1 qui est liée à la consommation d’alcool.

Mode de consommation

Le passage à l’âge adulte est un moment clé dans le binge drinking. C’est à ce moment précis, influencées par l’entourage, que certaines habitudes se développent.

Une enquête de 2001 a montré l’impact que peut avoir la consommation d’alcool d’un parent sur un adolescent. Si les filles auraient tendance à prendre le contrepied en ne buvant jamais, les garçons, eux, auraient plus tendance à suivre l’exemple à l’âge adulte.

Une étude américaine souligne aussi que chez les 12-22 ans, les meilleurs amis ont une grande influence sur les modes de consommation. Par là, les adolescents peuvent construire des habitudes négatives vis-à-vis de leur consommation d’alcool ou de substances, liées à une recherche d’indépendance et d’autonomie. Et tout cela va déterminer la manière dont ils vont boire à l’âge adulte.

Quatre types de buveur ont été recensés par Coslin, psychologue :

le « fêtard », qui boit en soirée, « l’aventurier » qui boit pour avoir des sensations, le « timide » qui souhaite se laisser aller et pouvoir discuter plus facilement et le « fuyard », celui qui veut échapper à la réalité. Et cette dernière catégorie serait la plus sensible à l’alcoolisme. 

Il deviendrait plus facilement dépendant, du fait qu’il trouve dans l’alcool un remède pour sa vie. Pourtant, boire ne signifie pas toujours être alcoolique. Mais certaines habitudes de consommation, elles, pourraient bien être un signe avant-coureur, notamment le fait de boire excessivement vite de l’alcool jusqu’au black-out.

Pour décompresser, évacuer le stress, se mettre à l’aise en société, un verre d’alcool peut faire du bien et n’est pas dangereux pour quelqu’un qui n’a pas de trouble avec l’alcool. Et « binge drinkez » de temps en temps, ne signifie pas forcément être alcoolique.

Mais il peut s’avérer dangereux pour l’individu s’il est régulier. Cela a un impact sur sa mémoire, et peut le pousser à avoir une dépendance vis à vis de l’alcool. 

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Dans la tête de ceux qui veulent faire durer le plaisir plus longtemps

Dans la tête de ceux qui veulent faire durer le plaisir plus longtemps

« Franchement des fois j’ai exagéré avec la coke mais là (avec la 4-MEC ou 3-MMC) c’est… 7 jours. »

Usager, Marseille, 2015

Chemsex : pourquoi ?

Jouissance, plaisir amplifié, l’utilisation de produits psychoactifs dans la relation sexuelle est de plus en plus commun dans la communauté gay, mais pourquoi ? 

Depuis quelques années, le phénomène du Chemsex et du Slam a pris de l’ampleur, et cela remonterait à l’antiquité. Utiliser des psychotropes dans les relations hétérosexuelles et homosexuelles était très répandu dans les fêtes dionysiaques. Ces fêtes, nées dans la Grèce antique, étaient destinées au dieu Dionysos, le dieu du vin.

Aujourd’hui, dans nos sociétés contemporaines, et avec l’arrivée de nouvelles drogues, ces fêtes sont devenues le lieu de la désinhibition sexuelle, surtout dans la communauté gay. Et le phénomène a beaucoup évolué.

À partir des années 1970, celui-ci a pris de l’ampleur avec l’utilisation grandissante du poppers, de l’ecstasy et de la cocaïne. Mais cette amplification était aussi liée au mal-être des gays face à une société homophobe et à l’apparition du sida. C’est toute la sexualité gay qui a été une nouvelle fois remise en question. 

L’acte sexuel entre deux personnes de même sexe, était encore conçu comme un acte transgressif, et a poussé les gays à concevoir leur sexualité autour de cette idée. Avec le sida et la surexposition médiatique de la sexualité gay comme étant synonyme de mort, cela était encore plus flagrant. 

Et alors apparut au milieu des années 2000, le Chemsex, “chemical sex” : l’utilisation de drogue pour accroître la jouissance sexuelle. Un moyen de vivre sa sexualité libérée de cette idée de transgression.

Une libération ?

Laure Westphal, psychologue, rapporte les propos de plusieurs usagers de Chemsex.

Clement comme Pablo, ont grandi dans des familles conservatrices et cela les a poussés, semble-t-il, à se définir eux-mêmes autour de la notion de transgressivité. 

La psychologue montre que le rejet subi par les jeunes gays, a eu un impact sur leur sexualité, au point ou certain « subvertirait le rejet en excitation ». On donne au rejet le sens d’un affranchissement et d’une libération de l’homosexualité. L’individu « exploite son fantasme d’exclusion sous la forme d’une sexualité qu’il estime transgressive et libératrice ».

Pour Clément, le Chemsex est un moyen de se sentir en sécurité vis à vis de la possibilité du rejet. Multiplier les relations sexuelles collectives, renouveler constamment ses partenaires, lui évite d’aimer ou d’être aimé. Sa sexualité est employée à titre défensif. Il déclare même voir « ses plans comme des anti-dépresseurs ».

Avec les applications de rencontres, favorisant le rapprochement des populations, il y a eu un accroissement du nombre d’usagers du Chemsex dans la communauté gay, et cela est lié à leur besoin de se libérer.

Et la jeune génération semble vouloir se lancer. Pourtant, malgré la possibilité de mieux s’informer sur les risques via Internet, la jeune population d’usagers semble ne pas vraiment être informée.

En effet, nouveaux et en dehors des cercles d’usagers réguliers, ces jeunes ont une faible connaissance des risques. D’après l’Observatoire français des drogues, ils s’en remettent à leur expérience personnelle, plutôt qu’à celle des autres, et ne sont pas réellement avertis sur les nouvelles drogues sur le marché.

Le Chemsex, une valse avec la mort 

« C’est vraiment utilisé dans le cadre de marathon sexuel, des week-ends entiers où le produit sert vraiment d’adjuvant à la sexualité. »

Intervenant en milieu gay Bordeaux, 2016

L’idée est donc d’accroitre ses capacités sexuelles, mais aussi de tenir plus longtemps grâce à une prise de MDMA pendant l’acte ou bien de cocaïne. Mais en voulant contourner la législation européenne plus stricte depuis 2008, de nombreuses autres drogues ont fait leur apparition.

« Tous les produits que les mecs ils prennent ? Y’en a plein, moi je les connais pas tous, ceux qui tournent le plus c’est 4-MEC, 3-MMC. Après y’a la MDPV, ils ajoutent souvent dans la 4-MEC de la kéta. Après on m’a parlé du B2 y’a pas longtemps… La plus utilisée est la 4-MEC, après la 3-MMC. »

Usager, Marseille, 2015

La 4-mec et la 3-mmc sont des cathinones, des produits qui stimulent l’empathie et amplifient les effets d’un contact physique. Elles ont été développées pour ressembler aux drogues les plus connues (MDMA, LSD). Souvent mélangés avec le GHB ou le GBL, les effets sont décuplés.

Le GBL est un solvant industriel. Il se transforme en GHB au contact de l’organisme. Cette substance est produite naturellement en petites quantités dans le corps humain, et elle a un effet sédatif, en ralentissant la respiration et le rythme cardiaque. Connue sous le nom de “drogue du viol”, elle peut faire perdre connaissance selon la dose administrée. Mal dosée ou avec d’autres drogues, elle peut aussi provoquer comas et décès. 

S’ils sont utilisés pour amplifier et faire durer l’acte sexuel plus longtemps, il y a un risque d’addiction. Une accoutumance aux cathinones créer le sentiment d’être addict au sexe plutôt qu’au produit. De ce fait, les usagers réguliers du Chemsex, ont tendance à augmenter les doses et à diversifier les usages, plutôt qu’à les diminuer.

Cette course à la jouissance, qui peut durer plusieurs jours, peut donc représenter des risques. Il semble aussi, selon Laure Westphal, que ces risques apportent du plaisir. “le Réel de la mort remplace le sexuel”.

Valser avec la mort devient orgasmique. Se mettre dans une situation de péril a un effet sur l’individu qui le pousse à se sentir encore plus vivant, mais aussi plus libre, quitte à prendre des risques incommensurables.

L’injection de ces produits par seringue, qu’on appelle aussi le Slam, est une manière encore plus efficace de ressentir les effets, mais peut aussi être plus dangereuse.

 « Au début de la soirée, tout est propre nickel, c’est chacun sa seringue et puis très vite on ne sait plus où on a posé le truc, on prend la seringue de l’autre. Les relations sexuelles se font non protégées. Des sessions d’une semaine grand maximum. »

Groupe focal sanitaire, Rennes, 2013

Pour les usagers moins réguliers, qui ne prennent pas autant de risques, c’est plutôt la descente du lendemain qui fait mal. Le Chemsex, permet la libération de substances chimiques euphorisantes, et cela accroît la possibilité de la déprime, notamment les jours suivants. 

Des maux de tête à un fort sentiment de culpabilisation, la descente peut donner envie de reprendre des substances. Mais il vaut mieux penser à s’hydrater, à prendre une tisane, à se reposer et à manger des protéines comme les haricots ou les bananes. 

Si le Chemsex apporte une certaine forme de jouissance, les risques encourus et l’idée de la mort permettent aussi de catalyser les individus, et les forcent à faire attention. Le corps peut même indiquer aux usagers de ne pas aller plus loin lors d’une prise excessive. Pourtant, dépasser ces limites peut aller très vite et les signaux ne sont pas toujours détectables.

Le Chemsex comporte beaucoup de risques

Pour les usagers, les infos qu’il faut retenir :

  • Il faut avoir confiance en la personne qui vend les drogues. Les fournisseurs sont des intermédiaires, et ne maîtrisent pas la qualité du produit. Il vaut mieux être avec un ami, et commencer par des petites doses, pour évaluer le produit.
  • Vous pouvez consulter aussi Infordrogue, il vous indique des nouvelles sur les produits dangereux qui circulent.
  • Pour aller plus loin : je vous conseille vivement le site Belge Chemsex. IST, VIH, consentement et agression, tout y est !
  • Pleaaase, be careful et protégez-vous. *coeur*
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Les jeunes, une « génération fin du monde »

Les jeunes, une « génération fin du monde »

Avec les fictions cinématographiques et les discours médiatiques comme scientifiques sur le changement climatique, la fin du monde n’a jamais été aussi tangible. Mais quels sont les impacts sur la jeune génération ?

Les jeunes et l’idée de fin du monde

La dystopie est un large sujet. Entre Black Mirror et le cinéma contemporain, ce sujet a pris de plus en plus de place sur nos écrans. Et avec l’arrivée des plateformes de streaming illégales comme légales, ces œuvres sont devenues accessibles en un clic.

Pourtant, depuis le milieu du 20 ème siècle, des auteurs tels que Stückrath et Schottmayer avaient mis en évidence les effets de cette culture sur les enfants.

« Cette accélération artificielle de l’emprise de l’environnement l’adulte sur l’enfant, l’oblige à une sorte de maturité prématurée, marquée par la brutalité, [et] le manque de confiance à l’égard des adultes. »

André Glucksmann, Les effets des scènes de violence au cinéma et à la télévision 

La deuxième guerre mondiale, et les catastrophes d’Hiroshima et Nagasaki, ont aussi eu un impact certain sur les individus et leur rapport à la fin du monde. Selon Günther Anders, philosophe allemand, la bombe atomique a changé et concrétisé cette relation.

Nous pensons maintenant notre existence en termes de délais, comme si elle pouvait se finir à tout moment. Et cela a participé à la culture de la fin du monde, à l’histoire que nous apprenons et aux films que nous visionnons.

Samuel Dock, psychologue pour adolescent, rapporte que tout cela finit par provoquer chez les jeunes des réactions d’angoisse et de détresse.

« Affirmer sans relâche que notre lieu de vie va se porter de plus en plus mal dans les prochaines années finit par contaminer les jeunes générations, qui ne voient aucun encouragement à lutter, ne perçoivent aucun espoir et envisagent alors très sérieusement la réalité d’une fin du monde devant eux. »

Samuel Dock

Et les discours sur le réchauffement climatique amplifient aujourd’hui cette détresse. Une enquête de YouGov a mis en évidence que 51 % des personnes sondées étaient angoissées à l’idée des conséquences du réchauffement climatique. Et ce chiffre augmente jusqu’à 72 %, chez les 18-24 ans.

Plus angoissés, car toujours face à cette idée de fin du monde, les jeunes ont donc une pleine conscience des défis qui sont les leurs. Pourtant, d’après l’anthropologue David Le Breton, ces jeunes sont aussi investis d’une mission.

« Ils doivent se comporter comme les héros de leur vie parce qu’on leur répète que tout est grave, dans la vie comme au cinéma. »

David Le Breton

Réveil des consciences

Avec Marvel, se comporter en héros semble signifier combattre pour la victoire du bien sur le mal. Pourtant, c’est plutôt la figure du Joker qui représenterait le mieux ce héros interne, qui permettrait aux jeunes d’agir face à cette angoisse de fin du monde.

Les bombes atomiques, le réchauffement climatique, l’information, la crise sanitaire associée à la réalité des conditions de vie, semblent avoir poussé la jeune génération à agir.

En fait, les individus confrontés en permanence à cette idée de fin du monde sont en situation de crise. À la manière du Joker, ils souhaitent remettre en cause le système en entier, et cela se traduit par un besoin de changer d’environnement.

Avec la pandémie et la politique des nombreux confinements, les conditions de vie des Françaises ont été mises en lumière. Santé Publique France remarque après plusieurs enquêtes, que les troubles du sommeil ont augmenté en même temps que l’anxiété et la dépression.

Pourtant, au niveau du travail, avant même la crise du Covid-19, un sondage Ipsos mettait en évidence que 57% des sondés déclaraient ressentir des émotions négatives au travail. 56% des moments intenses de fatigue, et 54% des problèmes de santé. Encore plus marquant, près de la moitié ont déclaré avoir des troubles du sommeil, et un tiers des troubles alimentaires. Et le meilleur pour la fin, près d’un tiers des sondés a affirmé souffrir d’au moins 4 de ces problèmes en même temps…

Tout cet environnement a permis à certains Français et à la jeune génération de passer à l’action. Et cela est encore plus vrai pour les jeunes diplômés qui cherchent du travail ou commencent leur carrière.

La sociologue Cécile Van de Velde, remarque que la question est d’ordre éthique. En effet, d’après elle, c’est une question qui touche les valeurs. « S’ajuster au marché du travail d’accord, mais jusqu’à où ? ». Les jeunes qui viennent d’avoir leur diplôme, renoncent à certaines valeurs pour s’insérer sur le marché du travail, mais en eux, ils « portent une critique radicale du système ».

C’est la raison pour laquelle certains jeunes veulent changer de vie, ou du moins de chemin. Monter son entreprise, quitter le marché du travail, deviennent la norme. S’il faut pouvoir se sentir en sécurité pour franchir ce pas, cette nouvelle tendance révèle un grand changement social. Pour elle, c’est « un acte de résistance politique ».

Le Joker est un individu qui est face à une société qui fait semblant d’aider les autres, et qui remet radicalement en question le sens de ce système. Si le film de Todd Phillips représente l’arrivée au cinéma d’un nouveau type de héros, il révèle aussi celle d’un nouveau besoin, celui d’avoir de nouvelles figures héroïques plus compatibles avec la réalité.

Ce nouveau héros remplit cette tâche. Il est la figure de celui qui se soulève malgré l’aversion qu’éprouve la société envers lui.  Et la jeune génération angoissée par la fin du monde, semble se confronter au même sentiment. C’est pourquoi la « génération fin du monde » se sent investie d’une mission, celle d’un renouveau de la société.

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Les relations amoureuses, un défi à l’ère du numérique ?

Les relations amoureuses, un défi à l’ère du numérique ?

Le chaos, dans nos couples et nos relations sociales, semble être de plus en plus visible dans nos sociétés. Le système dans lequel nous vivons en serait-il la cause ?

Liberté sexuelle et Internet

D’une relation à une autre, les individus semblent avoir une aversion pour les relations à long terme, mais pourquoi ?

Impactant les individus et leur relation avec les autres, Eva Illouz, sociologue, met en évidence que le système dans lequel nous sommes plongés, et la cause de la volatilité de nos relations sexuelles et amoureuses. 

L’amour était auparavant destiné à Dieu et à la religion. Aux mains de l’aristocratie, l’amour s’est détaché peu à peu de son aspect uniquement religieux, pour devenir le symbole de la liberté, au sens où les individus affirmaient leur amour contre les lois de l’Église, et la volonté des parents ou de la communauté. Roméo et Juliette de Shakespeare en est un parfait exemple. 

Le droit de choisir son partenaire et de se marier avec, devient alors une norme. Cela a eu un impact direct sur la vision qu’on avait auparavant du mariage, des autorités traditionnelles et de la vie de couple. Enfin protégée par la loi, cette liberté a participé au droit des femmes à disposer de leur corps, mais aussi à la liberté sexuelle en général. 

“La liberté de jouir de son propre corps et de le contrôler, (…) induit la liberté de choisir ses partenaires sexuels, mais aussi de commencer et de finir à sa guise une relation”  

Eva Illouz, La fin de l’amour

Les revendications sont de plus en plus nombreuses et les années 60 poussent cette liberté sexuelle jusqu’à ce qu’on pensait être son paroxysme. En effet, avec Internet, c’est tout un monde qui a évolué en accélérant le déclin de l’institution du mariage et de la religion. 

Anthony Giddens, sociologue, considère que ces mouvements, qu’il nomme aussi « modernité émotionnelle », redéfinissent « l’intime comme l’expression suprême de la liberté des individus ». Pourtant, selon lui, cela a poussé les individus à vivre aujourd’hui dans un état d’insécurité. 

D’après Illouz, les individus ont maintenant accès à plusieurs ressources culturelles comme technologiques, qui malgré eux, leurs offrent des modèles de comportements, notamment sur les sujets sexuels et amoureux. Mais les émotions eux, semblent poser plus de problèmes. C’est le règne de « la confusion, de l’incertitude, et du chaos ». 

L’insécurité dans les relations et le couple

La liberté sexuelle qui s’affirme à travers la culture consumériste et la technologie, est une cause centrale de ce chaos des émotions. Dans un monde capitaliste, où les institutions deviennent lucratives et où l’individu se sent toujours en compétition avec les autres, il y a une normalisation du plaisir auto-centré. Et cela joue un rôle dans la compétition et l’accumulation sexuelle.

D’après Jeffrey Weeks, célèbre théoricien queer, la politique néolibérale de déréglementation des marchés des occidentaux, a permise une des plus grandes révolutions sexuelles. 

“Si vous avez la liberté absolue d’acheter et de vendre, il n’y logiquement aucune raison de brimer vos partenaires sexuels, votre identité et mode de vie sexuels, ainsi que vos fantasmes” 

Jeffrey Weeks, Invented Moralities : sexual Values in an Age of Uncertainty

De ce fait, les relations ont été transformées et ont pris la forme d’un marché. Les individus ont la liberté d’arrêter une relation, de ne pas s’engager, ou d’en choisir une autre comme ils le souhaitent. C’est, selon Eva Illouz, le « marché des relations sexuelles ». Additionné à la technologie, amenant avec elle la pornographie de masse, tout cela joue « le moteur invisible de nos relations sociales ».

Avec les applications telles que Tinder ou Grindr, les rencontres sexuelles se sont organisées autour de ce concept de marché. Laissant les individus dans une incertitude affective. 

Une étude menée par l’université de North Texas au Etats-Unis, démontre que Tinder nuit à la confiance en soi. Considérés comme des objets sexuels, les individus se comparent entre eux et cela nuirait considérablement à l’estime qu’ils ont d’eux-mêmes. 

Pourtant, si les aventures sans lendemain ont quelque chose d’excitant et qu’elles ne sont liées qu’au plaisir et n’engagent pas les sujets, elles impactent la capacité des individus à créer du lien et à s’attacher.

Et même si la personne ne cherche pas un partenaire de vie idéale, et qu’elle souhaite seulement un coup d’un soir, elle se lance aussi dans une situation ouverte. 

Il n’y a pas vraiment de règle, et la personne ne fait pas confiance directement. De ce fait, l’individu est dans une incertitude vis à vis de la situation à venir, qui peut lui faire ressentir un sentiment de honte ou même d’insécurité. 

Et ce sentiment d’insécurité, n’est pas que le fait des applications. L’hyperconnexion et la technologie ont aussi un effet notable sur les couples.

Les individus dans les sociétés capitalistes, néolibérales, sont amenés à avoir des relations amoureuses et sexuelles, qui portent en elles la marque du système que ces individus cultivent. Par là, même engagés dans une relation durable, ce sentiment d’insécurité est présent.

Dans une étude sur Les rencontres et les relations à l’ère du numérique réalisée par Pew Research Center, 23 % des personnes qui ont participé et qui sont en couple ont déclaré se sentir en insécurité ou jaloux de la manière dont leur partenaire interagissait avec les autres sur les réseaux sociaux. Pour les personnes âgées de 18 à 29 ans, le pourcentage augmente jusqu’à 34 %. 

Le même pourcentage de 34 % est à noter pour le nombre de personnes en couple qui ont déjà été sur le téléphone de leur partenaire sans leur consentement. Les femmes sont d’ailleurs plus sincères en déclarant à 52 % l’avoir déjà fait, contre seulement 24 % pour les hommes. 

La société dans laquelle les individus sont jetés a un impact certain sur les relations sociales qu’ils vont entretenir. Pourtant, cet impact a aussi ces bénéfices. En effet, la liberté sexuelle indépendamment des systèmes économiques et politiques, est au fondement de la libération des individus et des droits. La question donc qui reste à se poser est plutôt celle de la structure politico-économique dans laquelle les individus continuent de se développer. 

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